Comment avez-vous trouvé votre vocation ?
Le mot « vocation » renvoie à un parcours religieux. Ce qui n’est pas faux, car ne l’oublions pas, nous travaillons chaque jour sous l’ombre imposante de l’Abbaye royale du Moncel ! Si l’on remonte aux jeunes années, mon père était dans l’aménagement du territoire, à l’âge d’or où tout était encore à faire, celui des logements à construire, des zones d’activités, des ponts et de la Direction de l’Aménagement du Territoire (DATAR). Étant petit, j’ai donc passé maintes soirées chez les notaires, après l’école, tamponnant avec délice des feuilles vierges, pour m’occuper. Nul doute que ces heures passées ont laissé une trace ! Mais plus sérieusement, j’en ai certainement gardé l’esprit de la mission de service public, qui doit animer chaque notaire.
Qu’entend-on traditionnellement par cette mission de service public ?
On l’a compris, le notaire est à la fois une profession libérale, un chef d’entreprise, mais aussi un délégataire de la puissance publique de l’État. Chaque jour, par le maillage territorial, il répond, le plus souvent gratuitement, aux demandes de renseignement de nos concitoyens, qui viennent nous questionner sur les questions les plus importantes de leur vie. Toutes les affaires que le notaire traite ne sont pas rémunératrices, mais elles sont toutes importantes, car elles renvoient à des étapes fondamentales de nos tranches de vie. La naissance, le mariage, l’acquisition d’un bien immobilier, la transmission du patrimoine, la succession. À chaque tournant de la vie, le notaire est là pour rendre les projets plus sûrs, participant ainsi au bon fonctionnement de la société. C’est là sa mission de service public, au plus proche des Français.
Quel est donc votre parcours ?
Je dirais que c’est un parcours assez classique, émaillé de la découverte de nos belles régions de France, un peu comme un tour de Compagnon au temps jadis. Le baccalauréat en poche au lycée à Senlis, j’ai rejoint les facultés de Paris XIII puis Paris II Panthéon-Assas, où j’ai passé ma maîtrise en droit, l’équivalent du master actuel. Lors de mes études, deux autres universités auront été marquantes, celle de Jean Moulin Lyon III et celle de Montpellier. En pays d’oïl et en pays d’oc, à la faculté comme en tant que clerc de notaire, j’ai ainsi pu découvrir la façon de penser et de travailler de chacun, dont j’ai précieusement gardé les enseignements.
Quel est le fil directeur de vos premières années dans le Notariat ?
Je ne vais pas le cacher, j’ai eu la chance folle de trouver, tout au long de mon parcours d’apprentissage, des maîtres à penser.
Tout d’abord, avec Maître Jean-Pierre Durosoy, notaire à Senlis, qui m’a fait rentrer dans le métier, et où j’ai pu découvrir le travail, en compagnie de son jeune associé d’alors, qui se reconnaîtra dans ces lignes, et du principal clerc de l’office et une équipe accueillante. À chaque étape, les anciens ont pu me transmettre les conseils, les outils, dirons-nous « la patte » technique qui s’est peut-être un peu perdue depuis, avec l’informatisation généralisée. Je suis content d’avoir connu cette période finissante du « fait main », qui favorisait la réflexion et la créativité. Puis, à Paris, une expérience d’une dizaine d’années avec une notaire formidable mais très exigeante, et enfin à Montpellier avec un ancien plein de bon sens et de fidélité en affaires, c’est important. Chacun a fait de moi ce que je suis aujourd’hui, et j’ai une grande tendresse en pensant à eux tous. Je souhaite à chacun, dans son métier, quel qu’il soit, de faire d’aussi belles rencontres fondatrices.
Et si l’on devait résumer vos activités passées ?
Puisque l’on parlait de la mission de service public du notaire, l’une des tâches les plus passionnantes qui m’aient été confiées était certainement le renouvellement urbain des territoires de Clichy-sous-Bois et Montfermeil, en région parisienne. Dans ces immenses copropriétés en difficulté, les charges n’étaient plus réglées, de ce fait les particuliers s’endettaient, l’état des bâtiments se dégradait et la valeur des appartements s’effondrait. Pour chacun de ces hommes et de ces femmes, il a fallu trouver une solution pour traiter ces dettes, leur laisser trouver un point de chute, et faire racheter par la collectivité chaque appartement, un à un. Une vie n’aurait pas suffi, mais l’énergie dépensée par toute une équipe en mairie, sociétés d’économie mixte, agence nationale et ministère était considérable. J’ignore si nos concitoyens ont une idée de l’ampleur de ce qui était – et est encore – à faire, parfois dans une atmosphère dramatique, comme lors des émeutes de 2005. Toujours dans l’immobilier, mais avec la casquette privée cette fois, quel plaisir de voir un immeuble sortir de terre, immeuble sur lequel on a travaillé avec le promoteur, pour organiser, mettre en copropriété, vendre sur plans. Une aventure collective à chaque fois.
Et pourquoi Pontpoint ?
Les années passées en tant que notaire assistant ont suscité en moi l’envie de sauter le pas, si possible dans le sud de l’Oise et la région de Senlis, ma terre d’attache. Pour cela, il fallait « seulement » – si j’ose dire – trouver la mariée, c’est-à-dire une étude notariale de bonne réputation, saine, que je pourrais reprendre pour continuer et développer l’œuvre des prédécesseurs. Lorsque j’ai appris que Maître Jean-Paul Lecointe pensait faire valoir ses droits à la retraite, c’est donc tout naturellement que je me suis adressé à lui. Je crois que sa façon de penser a rencontré la mienne. Je vous laisse imaginer le défi de reprendre un office notarial qui avait été transmis de père en fils, et j’ai essayé de m’en montrer digne. Chaque jour, adapter l’entreprise à demain, tout en conservant l’histoire et les valeurs qui en sont les marqueurs.